Interview et messages
Octobre 2006 : Le
bilan de 10 ans d'activité du Comité de La Ciotat vers la Croatie (Rijeka) et en lien
avec Shura Dumanic
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Septembre 2006
Zdravko, un Ami de Voïvodine nous fait part des activités dans leur société pour la Tolérance. "La plus belle part de notre temps, nous la consacrons aux jeunes autour de deux projets en cours et nous publions également notre journal Tolérance depuis plus de 10 ans". Je vous suis très reconnaissant pour vos messages. Avant tout je tiens à m'excuser pour cette réponse tardive. La raison en est très simple : moi je ne parle pas le français et je n'ai personne dans mon entourage qui maîtrise suffisamment bien cette langue. Une connaissance m'a traduit votre message aussi bien qu'elle le pouvait. J'aimerais énormément prendre part dans tout ce que vous organisez mais je ne suis pas en mesure de me déplacer à cause des obligations qui me retiennent auprès de ma famille. En plus, je suis tout le temps occupé avec les activités dans notre Société pour la Tolérance. La plus belle part de notre temps, nous la consacrons aux jeunes autour de deux projets en cours et nous publions également notre journal Tolérance depuis plus de 10 ans. Merci pour tout et j'espère des temps meilleurs où nous pourrions nous revoir et échanger nos réflexions. Zdravko Postovani Patrick, Veoma sam Vam zahvalan na Vasem javljanju u pozivima. Odmah na pocetku da se izvinem zbog kasnog odgovora. Razlog je vrlo jednostavan ja ne znam Francuski a i u mom okruzrnju je tesko naci nekoga ko govori francuski jezik. Jedan poznanik mi je preveo Vas E-mail onoliko koliko je znao. Ja bih vrlo rado ucestvovao u svemu ovome sto predlazete ali nisam u stanju da doputujem zbog obaveza koje imam u porodici. Pored toga stalno su neke obaveze u Drustvu za toleranciju. Najvise vremena provodimo u radu sa mladima na dva projekta a takodje izdajemo nase novine "tolerancija" vec vise od deset godina. Hvala na svemu i nadam se sretnijim vremenima da se mozda vidimo i razmenimo misljenje. Zdravko |
Rencontre avec Marie-Eve Rialland, Equipe de Paix Balkans (EPB) Septembre 2003
1 - Vous rentrez d'une mission d'une année au Kosovo pour l'association Equipe de Paix Balkans (EPB). Comment caractérisez-vous la situation actuelle des populations ? La phase d’urgence et de post urgence est désormais passée, le Kosovo est entré dans la phase de reconstruction de la société civile et des institutions, bien qu’il y ait toujours dans les villages isolés des familles en situation matérielle critique. Les kosovars ont reçu beaucoup d’aide financière depuis la fin de la guerre, mais cela ne suffit pas à établir une économie stable et saine. En effet, on constate qu’il n’y a toujours aucun investissement étranger qui permettrait de sortir progressivement de la " mise sous tutelle " financière. D’autre part, il faut savoir que la plupart des aides matérielle et financière ont bénéficié plutôt à la communauté albanaise. Je trouve que les populations locales deviennent très critiques vis-à-vis de la communauté internationale. Les Kosovars attendent désormais une aide constructive qui leur permette de reprendre plus d’initiative et de responsabilité dans la gestion du Kosovo. Ils se rendent compte que la situation économique dépend d’un secteur qui leur échappe, celui de la politique internationale. Tout particulièrement à Mitrovica, les Kosovars attendent la réouverture des usines, mais sont conscients que rien ne sera décidé tant que le problème du statut du Kosovo ne sera pas réglé. Albanais et serbes s’accordent à dire que la réconciliation ne pourra pas être effective tant que la situation économique ne s’améliorera pas. 2 - Quelle est la réalité de la cohabitation entre les communautés et y a-t-il d'autres lignes de partage entre les gens ? J’étais à Mitrovica, au nord du Kosovo, où la situation est bien particulière car la ville est encore purement et simplement divisée : le nord est habité par les Serbes, le sud par les Albanais. C’est dans cette ville que les communautés sont restées le plus séparées. En revanche, c’est dans la région de Gjilan, au sud est du Kosovo, qu’il y a eu le plus fort retour de réfugiés serbes. C’est là bas aussi que la coopération se passe le mieux. De manière générale, les communautés vivent donc séparées, sauf dans quelques endroits dits multiethniques où des voisins de communautés différentes continuent de vivre en bon terme. A Mitrovica, il existe quelques-uns de ces quartiers multiethniques, au nord de la ville. Les habitants de ces quartiers se respectent car ils connaissent le passé de chacun, et ceux qui y sont restés sont ceux qui n’ont pas pris part à des mouvements de violence entre communautés. Il existe aussi une autre forme de coopération, initiée celle-là par les projets de la communauté internationale. Ces projets concernent en particulier les jeunes, qui se rencontrent autour de projets culturels, sociaux ou sportifs. Ils se rencontrent soit en dehors du Kosovo, en terrain neutre, le plus souvent au Monténégro. Au sein même de la ville de Mitrovica, un espace a été délimité par la Kfor et désigné " zone de confiance ". C’est donc dans le café restaurant de cette " confidential zone " que se font des rencontres formelles ou informelles entre membres des communautés séparées. Des liens solides se créent, et ces jeunes rêvent désormais de se rencontrer en dehors de toute activité guidée. Mais de retour dans leur quartier, ils doivent faire face à la pression de leur propre communauté. Il existe bien sur d’autres lignes de partage entre les Kosovars, qui sont d’ailleurs souvent minimisées par les Internationaux. Très rapidement, on remarque une différence bien marquée entre les citadins et les villageois. D’ailleurs, certains albanais disent que s’ils n’osent pas retourner au nord de Mitrovica, c’est parce qu’ils craignent les représailles non de leurs anciens voisins serbes, mais des villageois serbes venus habiter la ville après la destruction de leur village. Il existe à Mitrovica un malaise ressenti à la fois par les Serbes et les Albanais originaires de cette ville : ils ne se reconnaissent plus dans leur ville et se sentent dépossédés par les nouveaux habitants venus des villages. 3 - Quels sont les objectifs de vos missions depuis que vous avez établi une étude sur les réalités au Kosovo ? L’objectif à court terme est de publier ces résultats et de les diffuser auprès des acteurs de la reconstruction au Kosovo : ONG, institutions locales (municipalités), Organisations internationales, mais aussi auprès des citoyens. Cette étude a été l’occasion de mettre en valeur l’importance d’élaborer un outil d’information objectif, car fondé sur l’avis exprimé par les kosovars. On a déjà vu, à l’occasion de discussions organisées avec les jeunes enquêteurs, que la situation était parfois diabolisée. Certains préjugés sur l’autre communauté ont pu tomber. Par ailleurs, cette étude a aussi pour objet de réfléchir à la notion de " projet multiethnique ", devenu le leitmotiv de la plupart des structures internationales intervenant au Kosovo. Certes, on peut considérer que c’est actuellement le conflit central au Kosovo, mais les internationaux en ont fait la seule grille de lecture de la société kosovar. A tel point que le critère de financement d’un projet sur place n’est plus le fond de l’action réalisée mais sur le respect des quotas de participants serbes et albanais. Ce qui mène bien souvent à des projets multiethniques complètement artificiels. Les résultats mis en valeur par l’étude ont permis de confirmer l’existence de ces autres lignes de partage entre les habitants du Kosovo, qui constituent autant de types de conflits potentiels entre les individus. L’ONG Equipes de Paix dans les Balkans s’est posée pour objectif général de faire baisser le niveau de violence de la société kosovar. Elle a choisit de ne pas tout centrer sur le conflit entre communautés serbe et albanaise, mais de travailler sur le conflit au sens large (qui peut être interpersonnel, basé sur les relations parents/enfants, entre communautés….). C’est pour ces différentes raisons qu’Equipes de Paix dans les Balkans proposent des méthodes de gestion du conflit en général. Libre à chacun ensuite de l’appliquer aux conflits auquel il est confronté au quotidien. Actuellement, les volontaires de l’ONG à Mitrovica proposent des ateliers de jeux coopératifs pour les enfants de 6 à 12 ans. A l’avenir, l’ONG envisage d’étendre ces ateliers à de jeunes adultes, et d’utiliser d’autres activités, comme le théâtre-forum. 4 - Comment est perçue la communauté internationale depuis la mise sous tutelle du Kosovo ? Les internationaux, au travers des soldats de l’OTAN, représentent la libération pour les membres de la communauté albanaise. D’ailleurs, beaucoup leur vouent un culte depuis lors. Un jeune albanais m’a expliqué un jour sa surprise et sa reconnaissance envers l’intervention américaine : " Comment pouvait-on imaginer que des Chrétiens, qui plus est des Américains, viennent nous délivrer, nous, Musulmans d’une Province quasi inconnue qu’était à l’époque le Kosovo ?! ". Depuis, l’avenue principale de Pristina (la capitale du Kosovo) a été rebaptisée avenue Clinton. Les panneaux mentionnent là bas le nom des rues dans les 3 langues, Albanais, Serbe mais aussi Anglais. La gestion du Kosovo par les Nations Unies est souvent interprétée par les Albanais comme une reconnaissance implicite de l’indépendance du Kosovo. Toutefois, certains commencent à déplorer une si forte présence militaire internationale. Ils souhaitent que les forces de l’OTAN se retirent peu à peu. En effet, certains sont d’avis que la situation ne justifie plus une si forte présence. Les kosovars sont conscients que pour justifier leur présence dans cette région, les internationaux sont obligés de décréter un niveau d’alerte suffisant pour y maintenir leurs soldats. Des jeunes albanais me disaient qu’ils commençaient à se sentir de nouveau sous occupation, celle des serbes ayant laissé la place à celle de la communauté internationale. En effet, l’argent versé par les internationaux se fait toujours sous forme de dons et toujours pas d’investissement. Donc on ne laisse pas les kosovars reprendre en main leur économie. D’autre part, la passation de pouvoirs des mains des internationaux à celles des kosovars ne se fait que très doucement. Certains sentent un manque de confiance de la part des internationaux. Du coté des serbes, la présence des
internationaux ne peut avoir la même signification, car la présence des
internationaux découle des frappes de l’OTAN contre la Serbie. A Mitrovica,
presque aucune ONG n’est installée dans les quartiers serbes. La police de la
MINUK y est très peu présente aussi, ce que déplore les Albanais, qui ne se
sentent pas traités à la même enseigne. En quelque sorte, les Serbes
boycottent la présence de la MINUK au nord de Mitrovica. Mais paradoxalement,
certains disent ne pas se sentir en sécurité, notamment car la MINUK ne fait
rien pour arrêter les criminels de guerre serbes réfugiés au nord du Kosovo.
Selon une jeune serbe de Mitrovica, les Serbes auraient plus peur des
extrémistes de leur propre communauté que des Albanais. Interview réalisée début septembre 2003 par Patrick Simon Membre du bureau national du Mouvement de la Paix
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